Savez-vous que boire du vin est très compliqué ?

Et oui, vous ne vous êtes jamais posé la question de savoir si le vin contenu dans ce flacon que vous ouvrez avec violence et sans retenue, car vous avez envie de boire un coup, est un être vivant

J’exagère un peu mais il faut bien comprendre que le vin n’est pas uniquement du liquide issu de la fermentation du sucre et du raisin en alcool accompagné d’eau, de tanins et divers élèments.

Non, votre vin a une âme, un squelette, un centre nerveux, du tempérament, des états d’âmes, voire même des vieilles douleurs.

Tout comme une personne, il aura ses bons cotés où il se sentira épanoui dans votre beau verre. Il sera « pipelette » et vous relatera les souvenirs de son terroir, de sa maman, la vigne, de son éducation dans les chais. Il sera même capable de vous laisser volontairement dans le doute en dévoilant quelques pistes sur l’avenir qu’il aurait pu avoir.

Tout comme une personne, le vin aura aussi ses côtés « chafouins », obscurs, réservés, voir des cotés très « con-con ». Et oui, votre vin peut vous « faire la gueule ».

Alors comment éviter cela ?

Et bien cela s’appelle le SERVICE du VIN, tout simplement.

Il y a bien sûr, la conservation du vin en amont qui est primordiale mais nous aurons l’occasion d’en parler ultérieurement.

Le SERVICE du VIN comprend tout le « cérémonial » voire dans certains établissements, une « mise en scène » à appliquer avant de le servir dans des verres adaptés.

1ère étape

Il faut avant tout disposer la bouteille choisie en position debout si possible 24 heures avant d’être servie. C’est d’autant plus vrai pour des vieilles bouteilles qui ont, en général, plus de dépôts organiques ou cristallins (blancs et rouges compris). Ces dépôts se sont concentrés sur une partie inférieure, la bouteille ayant eu une position couchée pendant quelquefois plusieurs années. Il faut donc faire glisser ces dépôts au fond de la bouteille.

2ème étape : le DECANTAGE ou le CARAFAGE

Cette étape est primordiale voire indispensable pour le service du vin. Elle permettra de mettre en confiance votre vin, de le réveiller s’il est encore un peu endormi, de le rassurer s’il est encore sur la réserve, et de le décontracter s’il est renfermé sur lui-même, de lui donner du volume et de la vie après avoir été sevré d’oxygène pendant plusieurs mois, plusieurs années.

Quels vins doit on décanter (carafer) ?

Je vous dirai : tous les vins.

Blancs ou rouges et contrairement aux idées reçues, plus les vins sont jeunes plus ils auront besoin d’être carafés et quelle que soit la région de production.

Pour les vieux vins, un DECANTAGE sera nécessaire mais attention ! La fragilité, l’élégance, la délicatesse d’une minorité de vieux flacons méritent une attention toute particulière pour les décanter.

Certaines personnes pratiquent même le décantage pour certains champagnes. Mais votre dévoué ne l’a jamais pratiqué.

Quand décanter ? Quand Carafer ?

Allez pour résumer et faire au plus simple, 2 heures avant le service est un bon compromis. C’est un peu bateau comme conseil mais, en général, on ne se trompe pas. Ensuite, il y a toujours des exceptions. Là intervient notre rôle pour vous conseiller le mieux possible pour chaque bouteille.

Pour des vins « simples », de consommation courante, un carafage juste avant de le servir peut largement suffire.

Pour des vins plus complexes, avec des tannins et des matières plus denses, plus d’heures sont nécessaires. On peut aller pour certains flacons à plus de 24 heures d’aération.

Quel est le but du décantage et du carafage ?

Comme plus ou moins écrit précédemment, le carafage permet pour les vins jeunes, de leur apporter de l’oxygène qu’ils n’avaient pas ou en très petite quantité en bouteille, de « casser » certaines molécules odorantes en versant le vin à une certaine hauteur dans votre carafe afin de libérer des arômes « cachés ».

Le carafage des vins jeunes va alors « réveiller » ces vins que l’on dit « fermés ». Cet état de fait est dû en général, à une mise en bouteille récente, une lune peu propice à la dégustation du jour, une phase de vieillissement capricieuse, etc…

Pour les vieux vins, les raisons sont différentes. En vieillissant, des dépôts et des matières colorantes se sont précipités. Ce sont des éléments naturels, normaux pour des vins « vivants » mais qui peuvent devenir embêtants quand vous les avez dans votre verre.

Le décantage (là on parle de décantage) a donc pour but de séparer ces « lies » du vin. Cette opération est fastidieuse car vous devez faire couler votre vin dans votre carafe tout doucement en ayant un œil sur le fond de votre bouteille où doivent rester les dépôts. Et j’ai bien écrit : « tout doucement ». Car votre vieux vin est comme une vieille personne. L’oxygène, il en a besoin, mais il n’a pas besoin d’être bousculé pour casser les molécules. Celles-ci se sont déjà « osmosées » à l’ensemble des composants pour former « le bouquet du vin ».

Cette opération est réellement très délicate. Pour ma part, par exemple, je ne décante jamais un grand Bourgogne ne voulant pas passer à côté d’arômes délicats et de grande finesse, qui sont très volatiles au premier contact de l’oxygène.

Quels types de carafes sont nécessaires ?

Pour les vins jeunes, j’oserai dire : toutes les carafes dignes de ce nom.

Par contre, vérifiez bien que le goulot soit bien cisellé. Il est toujours désagréable d’avoir des coulures le long de la carafe, tout cela par ce que le bord du goulot n’a pas « coupé » le vin. Et ça c’est le cas de la plupart des carafes bon marché.

Pour vos grandes bouteilles de vin rouge, privilégiez les carafes à fond plat. Votre nectar aura une plus grande surface au contact de l’air.

Pour les grandes bouteilles de vin blanc, j’adore les carafes hautes et élégantes. Un fantasme peut-être…

Bonne dégustation !

AH ! IMPORTANT, j’avais oublié…

Un mauvais vin, même décanté, restera toujours un mauvais vin voire pire. Au contact de l’air, il pourra développer des arômes très désagréables. Pour revenir à ma comparaison avec les êtres vivants, une personne naturellement désagréable (pour ne pas dire c..) restera une personne désagréable (voir encore plus c..) au contact de la lumière et des éléments extérieurs.

De même pour le sacro-saint problème du « Goût de Bouchon », le décantage ne fera jamais disparaitre cette odeur désagréable due à une molécule très odorante provenant du liège.

Et pour finir, je vais donner une petite astuce pour enlever le goût de bouchon de votre vin (soyons fou.. !). Faites couler le vin sur une portion de film noir à palettiser. Par une réaction chimique que je ne connais pas, ce défaut disparaitra. Cette opération m’a été dévoilée par Monsieur PAETZOLD, grand œnologue français.

Ce que je sais en revanche, c’est qu’il vous sera très difficile de récupérer le vin dans un récipient et que cette façon de faire, n’est, vous l’avouerez, pas très « classe »…

Eric RAFFAULT
Caves Raffault – 12 rue de la Poste – Châteauroux / 6 av du Lion d’Argent – Montgivray
www.cave-raffault.com